COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE
Une situation alarmante
Près d'un quart des Français déclare avoir renoncé à des soins pour des raisons financières au cours de leur vie. Les enquêtes les plus récentes menées par le Centre de recherche, d'étude et de documentation en économie de la santé (CREDES) et le Haut Comité de santé publique * révèlent que ce sont surtout les femmes, les jeunes et les personnes en situation précaire qui sont le plus touchés par ce phénomène.
Une situation que ne permet pas d'éviter l'actuel système de protection sociale. C'est ainsi que 40 % des chômeurs, 45 % des bénéficiaires de l'aide médicale gratuite et 38 % des bénéficiaires du RMI déclarent avoir déjà renoncé à se soigner du fait de leur manque de ressources.
Un renoncement souvent lié à l'absence de couverture maladie complémentaire. En moyenne 8 personnes sur 10 bénéficient d'une telle couverture mais chez les personnes dont le revenu est inférieur à 2 000 F, cette proportion se réduit à 51 %.
Particulièrement "sensible aux variations économiques" : la consommation de soins dentaires.
La CMU :une étape majeure dans la lutte contre l'exclusion
Permettre à chacun de bénéficier sans délai de la protection d'un régime de Sécurité sociale et d'un accès rapide aux soins est une urgence sociale. Le projet de loi instaurant la couverture maladie universelle (CMU) a été adopté par le Conseil des ministres du 3 mars 1999. En consacrant un droit essentiel l'égal accès de tous à la santé il complète ainsi l'action déjà menée en faveur des plus démunis, notamment via la loi contre l'exclusion.
Une véritable égalité d'accès à des soins de qualité
L'inégalité devant la prévention de la maladie et l'accès aux soins est une des injustices les plus criantes. Pour y remédier, le projet de CMU propose deux mesures fortes :
l'affiliation universelle au régime de base de la Sécurité sociale
la création d'une couverture complémentaire gratuite pour les plus modestes.
150 000 à 200 000 personnes ne bénéficient aujourd'hui d'aucune couverture maladie. Aussi, le premier objectif de la CMU est-il de rendre obligatoire et immédiate l'affiliation de ces personnes au régime de base de la Sécurité sociale. Et ce, sans aucune condition de statut, d'activité ou de cotisation.
Le texte présenté par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité propose donc que toute personne résidant "de façon régulière et stable" en France "relève obligatoirement du régime général". Une seule condition : qu'il n'ait pas de droit ouvert à un autre titre, dans un autre régime de base.
Inscription immédiate et automatique
L'affiliation à une caisse primaire d'assurance maladie sera immédiate et automatique dès que l'intéressé en aura fait la demande et qu'il aura déposé une justification de résidence. Il appartiendra à la caisse d'affiliation (CPAM) qui versera les prestations en nature dès le dépôt de la demande, de vérifier, par la suite, que la personne n'a pas de droits ouverts à un autre titre.
Autre avantage de ce nouveau mécanisme : chacun pourra disposer de sa carte d'assuré social, sans dépendre de son conjoint ou d'un parent. Les personnes qui seront affiliées dans ces conditions devront acquitter une cotisation proportionnelle aux revenus, au-delà d'un seuil de contribution. En contrepartie de cette affiliation au régime général, le texte prévoit de supprimer le régime de l'assurance personnelle volontaire dont les modalités s'avéraient très complexes pour les personnes les plus démunies.
Assurance complémentaire gratuite pour 6 millions de personnes
Deuxième volet de la CMU : la création d'une assurance complémentaire pour les personnes ne disposant que de faibles revenus.
Les bénéficiaires auront le choix entre adhérer gratuitement à une mutuelle, un institut de prévoyance, une compagnie d'assurance ou une CPAM (qui gérera alors la prestation pour le compte de l'État), aucun organisme ne pouvant refuser une adhésion.
La couverture complémentaire sera identique, quelle que soit la nature de l'organisme choisi. Cet organisme prendra en charge la totalité du ticket modérateur, du forfait hospitalier et des avances de frais, ainsi que certains dépassements tarifaires (sous certaines conditions). Si un adhérent à cette assurance complémentaire voyait ses ressources augmenter et dépasser un plafond, il conserverait pendant au moins un an le bénéfice de sa "complémentaire" gratuite.
Près de 6 millions de personnes (soit 10 % de la population) pourront bénéficier de ce nouveau droit contre 2,5 millions de bénéficiaires actuellement.
ASSURANCE COMPLÉMENTAIRE : LES CONDITIONS DE RESSOURCES
Le plafond retenu est celui du minimum vieillesse :
â 3 500 F mensuels pour une personne isolée ;
â 5 250 F pour 2 personnes ;
â 6 300F pour 3 personnes
â 7 700 pour 4 personnes.
Chaque personne supplémentaire au foyer entraîne une augmentation du barème de 1 400 F.
Financement : comment pérenniser la réforme
Le financement de la couverture maladie universelle a été conçu avec la volonté d'en assurer la pérennité. Pour financer la couverture de base, le projet de loi organise les transferts de ressources entre la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) et les financeurs de l'assurance personnelle, de manière à ce que la CNAM ne soit pas pénalisée par le supplément de remboursement auquel elle devra faire face.
La couverture complémentaire gratuite est une prestation de solidarité qui ne pèse pas sur les régimes de la Sécurité sociale.
Son financement sera assuré par :
une contribution des organismes de protection complémentaire,
le redéploiement des dépenses d'aide médicale des départements
une contribution de l'État.
Le coût de la protection complémentaire est évalué à 9 milliards de F par an (soit pour 6 millions de personnes, un coût unitaire de 1 500 F) mais si l'on déduit les sommes déjà versées par les départements dans le cadre de l'aide médicale gratuite, son coût net sera de 4 milliards de F.
L'État contribuera à ce financement, à hauteur de 2,5 milliards de F. Le reste (environ 1,75 milliard de F) sera financé par les organismes complémentaires (1,75 % de leur chiffre d'affaires santé).
Pour encourager ces organismes à s'engager dans le dispositif, cette contribution sera d'autant plus réduite que le nombre d'adhérents sera élevé.